L' ARN interférent ou ARNi a été découverte fortuitement : en 1990, Jorgensen et ses collaborateurs tentaient de renforcer la couleur pourpre de pétunias en introduisant un vecteur codant un pigment dans cette plante. De façon surprenante, certains pétunias devenaient partiellement ou totalement blancs, le gène introduit éteignant le gène naturel. En 1994, Wassenegger montra que l’introduction d’ARN double brin dans des cellules d’Arabidopsis thaliana déclenche une méthylation de l’ADN correspondant. Ce mécanisme a été initialement appelé "transcriptional gene silencing" ou TGS. L'expression ARN interférent désigne un acide ribonucléique simple ou double brin, qui interfère avec un ARN messager spécifique conduisant à sa dégradation et à la diminution de sa traduction en protéine. Il y a deux classes d'ARN interférents :
Les deux classes d'ARN interférents partagent plusieurs caractéristiques :
Plusieurs situations peuvent alors se produire :
Si on connait la séquence des nucléotides de l'ARN messager qui code pour une protéine qui nous intéresse, on peut synthétiser un siARN capable de s'hybrider avec cette séquence et l'introduire dans la cellule. On peut ainsi empêcher la synthèse de la protéine normalement traduite à partir de l'ARN messager.
On connait de nombreux cas dans lesquels une protéine est responsable d'une maladie. Par exemple, les virus infectent les cellules, y injectent leur génome et font produire par les cellules infectées les protéines dont ils ont besoin pour se répliquer. Si la séquence du génome du virus est connue, on peut utiliser l'interférence ARN pour empêcher la réplication du virus. Dans d'autres pathologies et notamment dans les cancers, certaines protéines sont exprimées alors qu'elles ne devraient pas l'être. Là encore, l'ARN interférence permet d'inhiber la synthèse de ces protéines indésirables. Une des grandes forces de l'ARN interférence, c'est sa spécificité. Du fait de la complémentarité des bases (A avec T, G avec C), un ARN interférent fait la différence entre deux ARN messagers de séquences très proches, par exemple entre un ARN messager normal et un ARN messager muté produit par une cellule cancéreuse. Cette spécificité ouvre une voie pour développer des traitements n'atteignant que la cellule malade sans perturber les autres cellules de l'organisme et donc dépourvus d'effets secondaires. Le séquençage systématique du génome humain nous a permis de connaître l'enchainement complet des nucléotides sur l'ADN de nos gènes. Il ne nous dit pas quelle est la fonction de ces gènes. En inhibant l'expression génique, l'ARN interférence permet d'accéder à cette information et de déterminer quelles sont les protéines dont la présence est indispensable dans un processus cellulaire donné (division, migration, apoptose...).